la chronique de Maurice Prax 07 juillet 1924 |
POUR ET CONTRE Tous les trois mois environ, pour nous faire prendre patience, on nous donne des nouvelles de ces fameux immeubles à loyers modérés qui nous sont promis depuis si longtemps, qui doivent être si beaux et si bon marché, qui doivent faire le bonheur des enfants et la tranquillité des parents. On vient donc de nous offrir, à leur sujet, la nouvelle trimestrielle. Et c'est une nouvelle qui ne manque ni d'ironie ni de cynisme. Voilà: On se demande aujourd'hui, en haut lieu, s'il ne serait pas opportun d'ajourner la construction de ces providentiels immeubles. On se demande s'il ne serait pas sage de rester quelque temps encore dans le farniente et dans la quiétude routinière du statu quo. On a l'air de nous dire, tout gentiment: Voyons! Voyons !... Est-ce une affaire si pressée que ça, cette affaire de bâtisses?... Est-ce vraiment bien la peine, et bien le moment, de bâtir des maisons?… Assise sur son trône, dame Administration, qui sait toujours trouver pour elle des appartements et des palais. répond comme le clown Grock aux malheureuses familles qui gémissent de se trouver sans abri: Pourtant, ce n'est pas une blague !... La crise des loyers n'est pas une plaisanterie mais un drame pitoyable. Le seul remède à cette crise, la seule espérance des pauvres locataires, c'étaient ces immeubles à loyers modérés qui devaient s'ériger aux extrémités de Paris, à l'air, à la lumière, au paradis !… Depuis le temps qu'on en parle, de ces belles maisons, nous pouvions croire qu'elles étaient déjà toutes prêtes à recevoir leur monde... Et on nous annonce, subitement, qu'elles ne sont encore que des projets, que des projets qu'il est bien question d'exécuter à cette heure mais qu'on ne songe à exécuter que selon la manière de M. Deibles. — Alors? Adieu, appartements, logements, foyers et couvées ?... Il faudrait savoir, une fois pour toutes. Il faudrait nous dire oui ou nous dire non. Il faudrait nous montrer des maisons neuves; ou bien il faut nous montrer franchement l'impuissance absolue, l'impuissance fondamentale de nos administrations et de l'Etat. Si toutes nos administrations conjuguées sont incapables de faire construire une simple maisonnette, il faut le reconnaître et il ne faut plus nous raconter d'histoires… Mais alors, ni les administrations ni l'Etat n'auront le droit de gémir sur la crise de la natalité, n'auront le droit d'essayer de nous faire croire que la dépopulation les préoccupe... Ce sera notre tour de dire comme le clown quand on nous offrira de beaux discours et de belles promesses… Maurice PRAX. |
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