L'Écho de Paris 06 juillet 1924 |
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NOUS POUVONS NOUS ORGANISER De nombreux lecteurs de l'Echo de Paris m'ont écrit à propos de l'article « Organisons l'opposition ». L'immense majorité des personnes m'ayant fait l'honneur de m'écrire disent: Il faut s'organiser, lutter; le Bloc des gauches représente la minorité des Français, ce sont nos divisions, notre manque d'organisation, de programme qui nous ont conduits à la défaite. Il est certain que nos adversaires sont organisés, et ils ont malheureusement comme cadres actifs la majorité des instituteurs et de très nombreux fonctionnaires. Nous réclamons la réforme de nos administrations, leur mise au point, alors que les radicaux-socialistes veulent à tout prix maintenir la routine actuelle, en vrais réactionnaires qu'ils sont. Nous voulons moderniser notre système. administratif, le rendre vivant, économique. Les contribuables qui ne veulent pas voir ce que leur coûte notre organisation périmée sont vraiment inconscients. Quant aux fonctionnaires, nombreux sont ceux qui, tout en désirant des réformes, craignent cependant d'en être les victimes. Il faudra certainement des mesures de transition, mais la réforme est indispensable, l'avenir de la France en dépend. Alors que l'Allemagne vient de diminuer de 350,000 le nombre de ses fonctionnaires, la France est, avec la Russie, le pays qui en possède le plus. Il n'est pas flatteur pour notre pays d'avoir les défauts de l'Empire des Soviets. Les Etats-Unis nous donnent un modèle d'organisation politique des partis. Dans ce pays, le parti républicain et le parti républicain démocrate ont l'organisation suivante : Les députés et sénateurs d'un parti forment une union qui nomme un comité directeur. En France, il serait nécessaire, en outre des parlementaires, de nommer membres de ce comité quelques notoriétés. Puis, les députés, les sénateurs de chaque Etat délégués à Washington, forment un comité régional dont font partie les élus de l'Etat; chez nous, ces personnes seraient les conseillers généraux. Ce groupement nomme à son tour un comité qui reçoit les directives du comité supérieur de Washington et qui organise le parti dans tout l'Etat. Des conférences, des réunions publiques sont organisées par ces comités, et des tracts résumant la conférence sont distribués à la fin des réunions; ces tracts permettent aux auditeurs de se remettre en mémoire la conférence et d'avoir des arguments de discussion. Plusieurs personnes prétendent que les tracts sont un procédé sans efficacité, c'est une erreur; c'est par les tracts, par les journaux que nos adversaires répandent leurs néfastes doctrines dans le pays. Il est évident qu'il y a un effort considérable à faire, il faut lutter contre des idées préconçues, atténuer les idées trop individualistes du Français. Puis, j'en reviens aux bourgeois, il faut qu'ils sachent bien que leurs affaires auxquelles ils se consacrent, quoique menées par eux, c'est entendu, péricliteront si le gaspillage et la décomposition nationale continuent et s'accroissent. Le suffrage universel, qui est maître de la France, est en général, très mal éduqué, il ignore les questions économiques tant françaises que mondiales. Comment espérer des élections intelligentes, si vous ne cherchez pas, non la veille des élections, mais à tout instant, à éduquer l'électeur ? La presse radicale-socialiste et la presse socialiste promettent beaucoup aux électeurs; tous les jours, elles excitent les passions, les jalousies, les haines, afin de dominer; mais elles se gardent bien d'éduquer l'électeur. Il est risible de parler des travailleurs conscients, alors que dans les réunions d'extrême-gauche, il n'est pas question des problèmes sérieux du travail, de l'agriculture, de l'industrie, du commerce, alors que seules y sont développées la haine, la jalousie, les théories antiscientifiques du socialisme de Karl Marx. Une organisation puissante, vivante, dans le genre des organisations américaines, peut nous éviter la ruine de la France. Il est indispensable de se mettre à l'œuvre. GASTON JAPY. Sénateur du Doubs. |
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